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Les promenades de Bergisel

Je vous propose quelques impressions de mes voyages et visites, illustrées par mes photographies. Avec pour toile de fond : l'Histoire.

Et maintenant ?

Et maintenant ?

Et maintenant ?

Petite citation pédagogique :

"Dieu se rit de ceux qui déplorent les conséquences alors qu'ils en chérissent les causes"
Bossuet

 

Au lendemain du Dimanche 11 janvier 2015, que d'aucuns qualifient comme la journée historique la plus importante depuis la Libération, et à laquelle on attribue les mots clés "Liberté et "République" on doit se poser la question et maintenant ?  D'autres et parfois les mêmes déclarent de manière quasi péremptoire que "rien ne sera plus comme avant", une expression qui me fait remonter des souvenirs, comme du déjà entendu depuis que je suis d'un âge où on comprend les choses sérieuses, en gros depuis que je suis adolescent.

 

Hier nous avons communié dans l'espoir et le recueillement en tout cas pour moi, et en ce qui me concerne, dans la réflexion aussi sur nos échecs accumulés, nos reniements, nos abandons. Il ne suffit pas de crier "Liberté", "Charlie", et de décliner les slogans préparés à l'avance mais aussi spontanés, formatés dans une charge émotionnelle, très compréhensible, à la suite des événements dramatiques des jours précédents, pour donner un sens aux lendemains. Pour beaucoup le 11 janvier 2015 est un point d'orgue. Nombreux dans la foule de Paris mais aussi dans les rassemblements de province aurons retenu que tout cela c'était pour se battre pour la liberté d'expression. Je serais tenté de dire "que ça" alors même que c'est bien plus que cela. Exprimer que les manifestants étaient présents là pour la "Liberté" et la "République" c'est important, certes, encore faut-il donner du contenu à ces mots, réfléchir à ce que nous voulons faire pour sauver cette "Liberté", cette "République", bafouée elle-même, violée par ceux-là mêmes qui en ont la responsabilité publique et parfois par nous-mêmes citoyens.  J'ai entendu, j'ai lu ici ou là que nous devions songer à l'avenir de nos enfants, de nos petits-enfants.... là aussi il faut donner du corps à cette pensée immédiate. Il est bien entendu qu'il y a de ça. Mais comment faire ? que met-on dans cette enveloppe "l'avenir". Il ne s'agit plus de rêver ! Nous ne pouvons pas faire table rase du passé comme si nous étions devant un territoire tout neuf, une étendue vierge, nous ne pouvons pas passer par pertes et profits, nos échecs, j'y reviens, et nos reniements mais aussi notre incapacité à intégrer des populations arrivées en France bien souvent parce qu'il y avait de la lumière.

 

Même si on observe dans ces populations de brillantes réussites dans celles que nous avons accueillies ou qui se sont invitées elles-mêmes, il n'en reste pas moins qu'il y a des échecs. Et bien souvent pas n'importe quels échecs. On le voit. Et ne datons pas cela d'avant-hier comme beaucoup le font. c'est commode. La question se pose depuis des années sans que personne ne trouve une solution ou n'éprouve la volonté de rechercher une solution ! Pour faire court nous constatons un épiphénomène violent, criminel, comme si un volcan avait surgi à la surface de l'océan. "Rien ne sera comme avant !" certes il y a un avant et un après mais que fait-on de ce facteur : tous ces jeunes perdus qui sont plus tentés par le "djihad" que par notre modèle de société qui s'appuie sur les valeurs républicaines. Posons-nous la question : qu'avons-nous fait nous-mêmes de ces mêmes valeurs ? Interrogeons-nous sur l'éducation de ces enfants. Education familiale bien  entendu mais aussi sur les bases fondamentales de connaissances que nous devons leur transmettre. Autant le dire je n'ai pas de solution clé en main mais je m'appuie sur une connaissance assimilée sur le terrain, et non pas ingérée dans des amphis ou en fréquentant le microcosme politique qui est parfois, pour ne pas dire souvent, très occupé à nager dans la vanité et l'auto-satisfaction.

Je fais un retour dans un passé récent :

 

J'ai eu la chance de croiser un journaliste Christian Jelen, qui travaillait au Point après avoir écrit pour le Nouvel Observteur. J'ai dans ma bibliothèque ses ouvrages, lus, relus annotés comme tant d'autres. Ce n'est pas ma bible car j'ai eu et j'ai d'autres lectures que j'ai confrontées à mon expérience, à mes constats. Méfions-nous au passage de ce mot "expérience" qui est aussi, parfois, dit-on, la somme de nos erreurs !

Quand on recherche les dates d'édition de ces ouvrages on constate que le sujet posé ne date pas d'hier, ni d'avant-hier... mais remonte à une trentaine d'années. Et encore, comme on dit je suis gentil ! J'ai retrouvé dans mes disques durs d'archivage une fiche de lecture que j'avais rédigée au milieu des années 2000 alors que je travaillais depuis près de quinze années à lutter contre la délinquance et la criminalité dans des zones qui étaient déjà, pour certaines, des zones de non-droit .

""""Trois ouvrages de Christian Jelen : « La famille, secret de l'intégration », « Les casseurs de la République » et « La guerre des rues ».On ne peut pas comprendre ce qui se passe actuellement dans de nombreuses banlieues françaises si l'on n'a pas lu les ouvrages d'enquête de Christian Jelen, journaliste au « Point », spécialiste des problèmes de société et d'immigration.

Ce qu'écrit Jelen n'est pas politiquement correct. Il a regardé les statistiques, s'en est procuré plusieurs, il est allé dans les banlieues, a fait des enquêtes, a rencontré des victimes et des fauteurs de troubles. Les analyses des politiques de droite et de gauche ont souvent été démenties par les faits. Ils ont réduit les premières émeutes du début des années 1980 au dérapage de quelques « allumés ». Lorsque l'affaire devient plus sérieuse, aux alentours des années 1990, ils croient aux seules vertus de la « prévention », du « développement social » et de l' « insertion ». Faute de bon diagnostic, le nombre de quartiers qualifiés de dangereux est en constante augmentation. Ces élus ont eu peur de reconnaître que la délinquance est l'œoeuvre d'une minorité de jeunes Français, qu'il s'agit là d'un problème d'intégration et non pas d'une « faute » de la société.

Pour Christian Jelen, montrer les faits est un devoir du journaliste enquêteur. Et ce sont justement ces faits que les politiques refusent de voir. Jelen montre, exemples à l'appui, que ce ne sont pas seulement les cadres de vie qui incitent à la violence. A Strasbourg où des voitures sont brûlées toutes les nuits avec un pic lors de la Saint-Sylvestre, on ne trouve pas des barres en béton ou des tours abîmées. Au contraire, les espaces verts abondent, ainsi que les équipements socioculturels. Pourtant, les violences sont au-dessus de la moyenne nationale. A contrario, dans le Nord-Pas-de-Calais où de nombreuses banlieues sont hideuses, avec un taux de chômage deux fois plus élevé qu'à Strasbourg, les statistiques de la délinquance sont en dessous de la moyenne nationale.

Jelen dénonce aussi les innombrables politiques publiques soldées par autant d'échecs. Depuis que Mitterrand a déclaré après les émeutes de Vaulx-en-Velin de 1990 qu' « il y a de bonnes raisons au pillage et au saccage » et a inauguré un plan de la ville, de multiples plans ont vu le jour : plan Delebarre, plan Tapie, plan Raoult en 1995, plan Sueur, plan Bartolone en 1998 et plan Borloo en 2004. Des milliards de francs et d'euros ont été déversés sur les « zones urbaines sensibles ». En pure perte, puisque la délinquance n'a cessé d'augmenter.

Et Jelen montre, toujours exemples à l'appui, que les équipements d'Etat, centres sportifs, maisons de la culture, services publics, transports, ne font pas du tout défaut dans les quartiers sensibles. Au contraire, ces quartiers en sont souvent mieux pourvus que d'autres. La violence ne découle pas d'un problème d'ennui mais d'une déculturation et d'un désintérêt pour la culture et le savoir. Les « jeunes » s'ennuient parce qu'ils ne s'intéressent à rien et, comme ils ne risquent pas grand-chose, ils préfèrent casser ou brûler des voitures.

Villepin continue cette politique. Encore un « plan social pour les banlieues », 15 nouvelles zones franches alors que l'on connaît l'échec de ces zones, un nouveau « machin administratif », l'Agence pour l'égalité des chances, alors qu'il existe déjà de nombreux organismes publics et para-publics qui font la même chose (comme la Haute Autorité de lutte contre les discriminations), l'ANPE mise à contribution alors que son échec au plan national est connu de tous et, enfin, 100 millions d'euros distribués aux associations sans aucun plan, évaluation ou étude des besoins. Par ailleurs, l'argent des associations en France représente environ 45 milliards d'euros par an sans savoir exactement où va l'argent….""""

 

Il faut bien se remettre en tête que d'autres événements sont survenus depuis ce résumé qui peut paraître incomplet, mais il ne s'agit que d'une fiche de lecture. Il faut appuyer sur plusieurs aspects qui sont des points incontournables : l'éducation familiale, l'acquisition des connaissances fondamentales de base. Je ne suis pas surpris que des jeunes partent à la dérive lorsqu'ils vivent dans des milieux où les mères, bien souvent, ne sont là que pour faire la cuisine et enfanter. Le poids des fameuses traditions les maintient dans l'ignorance... les pères sont souvent courageux mais ceci ne les exempte pas d'être sans emploi ... les filles comme les mères restent soumises au carcan patriarcal. L'esclavage commence dans la famille. Il est évident que pour elles l'échappatoire ce sont les études où elles réussissent, quand cela leur est permis, brillamment. Pour les autres c'est la soumission, les sévices physiques, voire sexuels, quand elles ne respectent pas les codes. La première discrimination est dans la famille.

 

Pour les garçons les perspectives d'avenir se trouvent souvent dans l'économie souterraine où l'argent facile circule sans grande difficulté pour l'acquérir,  tant les marchandises sont là à portée de main : stupéfiants, marchandises colées et revendues. Mais pour appuyer ces flux il faut aussi des armes. Les mères sont très fières de leurs garçons qui réussissent ne s'interrogeant pas plus sur la présence d'un cabriolet BMW symbole d'un statut d'intégration mal analysé !

Pour d'autres c'est l'endoctrinement auprès de prédicateurs autoproclamés. On apprend le Coran à travers des extraits soigneusement choisis, souvent traduits. Quand on est illettré en français il n'est pas dit qu'on sache lire et écrire la langue arabe. Des esprits faibles sont tentés par la promesse, pas tant d'une vie matérielle meilleure, mais du paradis des Martyrs.

Quand on ne s'occupe pas de ses problèmes, d'autres le font à notre place avec les résultats qu'on connaît !

Il faut rappeler quand même que le principe de laïcité est rejeté par les intégristes musulmans ! Il en est de même pour la liberté. Ils n'en ont que faire et si j'ose dire pour eux c'est du "Chinois" !

Alors je veux bien qu'on crie les mains agitées "LIberté" et qu'on m'envoie à la figure "la République" mais il faut donner du contenu à ces notions. Pas à moi mais à ces jeunes ! Un ami m'a pratiquement expliqué que les rassemblements trouvaient leur fondement dans ces deux notions. Oui et alors ? C'est à ces jeunes qu'il faut l'expliquer !

Le sang algérien ... pour les causes des autres !

 

© La Matin Algérie 15.01.2015

La France semble situer l'importance du danger islamiste et s'organise pour l'affronter dans l'unité, avec les armes de la démocratie et de la mobilisation citoyenne. En tout cas, ils ne se précipitent pas dans la solution de facilité pour restreindre les libertés publiques. L'ensemble de la classe politique française convient, par la force des évènements, que ce n'est pas "un problème de banlieues" ou les conséquences de l'échec scolaire des Français issus de l'immigration. Il s'agit bien d'une guerre contre le terrorisme islamiste, et cela a été dit par les plus hautes autorités de l’État français.

Notre propos ici n'est pas de commenter la mobilisation d'un Etat souverain pour protéger sa population, sans exclusive, mais de nous poser une question qui nous parait fondamentale : pourquoi la plupart des attentats terroristes liés à l'islamisme sont perpétrés par des jeunes d'origine algérienne (Khaled Kelkal, Smaïn Aït Ali Belkacem, Mohamed Merah, Mehdi Nemmouche, les frères Kouachi, etc.) ?

Ce n'est pas un hasard. L'intégrisme islamiste, à l'image de ce qui se passe en Algérie depuis les années 1980, a pénétré plus tard la population immigrée d'origine nord-africaine et algérienne particulièrement, dans sa forme la plus violente depuis 1992. Et la jonction du radicalisme islamiste avec la délinquance et le banditisme dans les banlieues n'explique pas tout. L'un des relais du GIA en France, il y a quelques années, préparait une thèse de doctorat de physique nucléaire lorsqu'il a été appréhendé.

Ce terreau "algéro-islamiste" est, avec certitude, un effet collatéral de la politique arabo-islamiste menée par le FLN au pouvoir depuis 1962 et de son prolongement dans l'émigration.

Depuis 1962, l’État algérien a tout fait pour contrôler la population algérienne en France au moyen de la sinistre "Amicale", relais du FLN et des services secrets, afin de juguler toute tentative d'organisation de l'opposition politique au régime d'Alger. Des milliards ont été dépensés pendant des années pour s'assurer de la fidélité de ses relais, du recyclage des fonctionnaires de police et des services dans des affaires les plus douteuses.

L’État algérien a organisé et financé depuis des années la naissance et le fonctionnement de "la cinquième colonne"(*) par l'envoi de milliers d'enseignants de langues arabe et d'imams des mosquées, dont le rôle réel était de renforcer l'exclusion de la communauté immigrée de la communauté française (**). Le discours officiel était "de développer le sentiment national dans la très glorieuse personnalité arabo-islamique", initiée alors par Houari Boumediène pour fabriquer "l'homme nouveau", "l'Algérien nouveau" ! L'Algérie a ainsi reproduit au sein de l'émigration en France, ce que l'Egypte avait fait en 1962 lorsqu'elle a envoyé en Algérie, à la demande de Ben Bella, des contingents d'enseignants frères musulmans.

Quelques décennies après, les dégâts sont considérables. La descendance des anciens immigrés se trouve souvent doublement marginalisée : rejetée par l'Algérie (et rejetant eux-mêmes l'Algérie à laquelle ils ne s'identifient pas) et stigmatisée par la société française, jusqu'à créer un mot spécifique pour les désigner, "les jeunes des quartiers", "la racaille" (le non-dit est souvent lourd de sens : "quartiers difficles", "quartiers de délinquance", "quartiers où les lois de la république ne s'appliquent pas", etc.). Dans l'impasse, beaucoup de ces exclus, par l'effet amplifié des chaînes TV moyen-orientales, se construisent une patrie mythique dans le royaume des sourates.

Ainsi, le résultat des actions conjuguées des enseignants arabisants, des imams spécialement choisis et des délinquants recyclés dans l'islamisme, dans les prisons notamment, constitue aujourd'hui une situation explosive.

Le sang des jeunes "d'origine algérienne" est ainsi disponible, à peu de frais, pour servir la cause des autres, des islamistes, pour le compte des émirs algériens, irakiens, yéménites ou d'autres califes douteux pour leur funeste projet de califat islamique.

Malheureusement, il y aura dans le futur en France d'autres Merah, d'autres Kouachi sanguinaires pour causer d'autres dégâts et nous faire ressentir de nouveau la gêne et le sentiment "d'avoir honte d'être algérien". La bombe FLN est dégoupillée depuis longtemps.

Aumer U Lamara

(*) "Cinquième colonne" : expression bien connue, utilisée il y a quelques années par certains hommes politiques français, lors d'uneénième révolte des banlieues parisiennes.

(**) L'hymne national français, La Marseillaise, a été sifflée au Stade France par les jeunes Beurs lors du match de football France-Algérie le 6 octobre 2001. Les initiateurs de cette action étaient venus de la région lyonnaise, missionnés par leurs ainés de l'Amicale, pour siffler la Marseillaise.

Le dilemme du Français musulman

 

© Le Matin Algérie 16.01.2015

La barbarie qui s’est abattue sur la France en ce début janvier ne peut laisser indifférent tout être sensible doté d’un cœur d’humain, même si nous Algériens en avons vu d’autres pendant la décennie noire (200.000 victimes de la folie islamiste du FIS conjuguée à celle d’un pouvoir militaire tout aussi barbare, comment l’oublier?).

Aux larmes des Français de souche, du Breton à l’Alsacien, du Lillois au Parisien et au Marseillais, se sont mêlées les nôtres, celles de tous les étrangers, maghrébins en premier, épris de liberté, qu’elle a accueillis sur ses terres. Et croyez-moi, nous sommes nombreux, bien plus nombreux que ces égarés formatés à glorifier la mort et un paradis factice au lieu de célébrer la vie sur Terre.

Plus jamais ça au pays de Voltaire ! Pour cela, il ne faut plus se taire, car se taire c’est se rendre complice de la bêtise humaine en cette période cruciale où l’engagement républicain doit surpasser toutes les différences.

Ne pas se taire, c’est continuer à dénoncer ces dérives idéologiques totalitaires desquelles les obscurantistes de tous bords puisent des permis de tuer des hommes et des femmes débordant de chaleur humaine dont le  seul tort, à leurs yeux, est de semer ces symboles de l’innocence que sont  le rire, la joie, l’allégresse et la célébration de la vie, ces antinomiques de la dévotion aveugle, aux motifs saugrenus de non-respect de quelques préceptes prétendument tombés du ciel. Préceptes souvent  professés par des instructeurs aliénés que Voltaire surnommait les fainéants sacrés. Nous sommes nombreux sur ce journal des idées et du débat à alerter sur les dangers islamistes depuis de nombreuses années. Malheureusement, nos messages ont une portée bien réduite eu égard à la dimension gigantesque que requiert le terrain d’un tel engagement. D’autant qu’à cet espace modique qui nous est imparti est opposé celui, beaucoup plus vaste et puissant, de l’audiovisuel dans lequel des "honorables" Tarik Ramadhan sont sollicités en permanence pour justifier une cause obscure, avec un discours d’une extrême "intelligence" pour les faibles d’esprit. Discours construit pour convaincre tout cerveau malléable du bien-fondé d’un engagement pour la cause d’un Dieu dont lui seul serait pourvu du discernement nécessaire et suffisant pour en décoder les signes (comme il le revendiquait (le revendique-t-il toujours ? Je n’ose même plus le vérifier) sur son site internet), pendant  que les "ennemis" d’Allah découvrent des jumelles de la Terre aux confins de l’univers. Connerie quand tu nous tiens se serait exclamé Cabu !

En ces lendemains de deuil, la France serait bien avisée de donner la parole à ceux qui ont épousé le moule de la république tout en ayant le courage de la confisquer à ces avortons de Dieu dont la mission sur Terre est de forcer l’humanité entière à s’incliner, se prosterner et se glisser dans le tunnel des ténèbres, quitte à exterminer la moitié de l’espèce humaine, comme ils s’étaient attelés à le faire en Algérie, et comme ils le font en ce moment dans les territoires déclarés daesh en Syrie, en Irak et au Nigeria de Boko Haram.

Afin que la France ne devienne pas le terrain et l’otage de guéguerres stupides importées d’orient et menées par des factions qui revendiquent  l’héritage d’un message obsolète en l’an 2015, il est utile de délimiter les culpabilités  des massacres de Charlie Hebdo. Et, de mon point de vue, la responsabilité de ce qui s’est passé incombe aussi et en premier lieu à ces vociférateurs du CFCM et au recteur de la Grande Mosquée de Paris, lesquels, souvenons-nous, avaient mobilisé les musulmans contre Charlie-Hebdo suite aux caricatures sur Mahomet, en organisant des manifestations et rassemblements de croyants à grande échelle dans la plupart des grandes villes de France. On n’appelle pas à des rassemblements contre Charlie-Hebdo sous prétexte d’offense porté à l’islam pour ensuite venir faire semblant de pleurer les victimes des attentats du 7 janvier, en toute impudeur!  Il est grand temps de pointer du doigt  les vrais coupables, les blâmer et leur faire porter leur part d’irresponsabilité et de faillite à leur mission, celle de n’avoir pas su empêcher que de jeunes innocents soient formatés pour tuer et se suicider pour défendre une cause insensée en toute démence, et celle de n’avoir pas su insuffler un islam dépassionné dans cette jeunesse en mal de repères et plongée dans le désarroi et l’amertume d’un quotidien pas toujours gai et enchanteur.

Les attentats contre Charlie Hebdo, tout comme ceux du 11 Septembre 2001 à New York, mettent l’humanité entière devant une responsabilité qui engage l’avenir de la survie même de l’espèce humaine. Une telle responsabilité exige de développer des chantiers d’éducation universelle dans tous les pays de la planète, en particulier dans ces pays musulmans dans lesquels les programmes scolaires gravitent autour d’un endoctrinement pervers qui transforme l’écrasante majorité des collégiens, lycéens et universitaires en farouches combattants d’Allah. C’est une condition nécessaire et certainement suffisante pour la construction d’un monde uniformément civilisé,  à même de stopper la propagation vertigineuse du monde des ténèbres. Tel combat d’éveil doit être mené sur le terrain du discours d’alerte partout sur la planète, car il ne s’agit pas de dresser une partie du monde contre une autre, l’une qui serait évoluée et l’autre pas, mais d’arrondir les différences des uns et des autres à travers une charte morale universelle qui écarte toute référence à ces textes au nom desquelles la violence est érigée en mode opératoire exclusif comme du temps les plus reculés des croisades et autres expéditions fanatiques entreprises par toutes les religions pour conquérir et asservir des peuples inoffensifs partout sur la planète. Il s’agit donc d’une définition générique du terme civilisation, une définition qui ne laisse pas le moindre espace à quelconque amalgame comme semblent le ressentir les musulmans face à des propos sommes toutes rationnels qui osent pointer du doigt l’Islam. À moins de faire preuve d’une mauvaise foi primaire, comment renier l’évidence criarde que la racine du mot islamisme se trouve bien dans les cinq premières lettres qui composent ce mot ? Que les grands ulémas musulmans nous expliquent et nous proposent les moyens d’éviter l’amalgame qui est fait entre islam et islamisme alors qu’ils refusent tous l’idée d’une réforme de fond des textes, une réforme urgente qui nécessite du courage intellectuel à même de nettoyer le Coran de tous ces appels explicites au meurtre que les extrémistes de tous bords appliquent au premier degré.

Ce que vient de vivre l’Hexagone nous touche profondément, nous qui avons fui la barbarie islamiste des années 1990 en Algérie pour venir nous réfugier en France. J’avoue qu’au soir du 7 janvier, l’idée d’aller vivre ailleurs trottait sérieusement dans ma tête. Mais cette idée s’est dissipée le soir du 11, suite à cette symbiose magnifique entre le peuple et ses représentants, réunis pour une même cause, un même combat : ceux de dire non à la barbarie islamiste! L’islamisme avait pourtant été vaincu en Algérie avant d’être réintroduit par Bouteflika, cet islamiste déclaré, l’ami que la France officielle soigne et soutient sans le moindre état d’âme, alors qu’il fait partie de ceux qui ont encouragé les filières islamistes en Algérie en pardonnant aux assassins, et par voie de conséquence en France aussi. N’avait-il pas affirmé toute honte bue "je me sens plus proche des islamistes que des démocrates" ? À ce propos, il est bien dommage que la France officielle n’ait pas tendu la main aux démocrates algériens, car cela faisant, le terreau de l’islamisme aurait été épuré depuis plus de 20 ans. Au lieu de cela, on a offert l’asile politique aux sanguinaires du GIA et soigné monsieur Bouteflika, leur représentant légal.

Dommage aussi que le sursaut républicain du peuple Français fut entaché de la présence de représentants insolites tel que ce prince d’Arabie Saoudite, présence qui relève de l’hypocrisie la plus absolue. Car comment continuer à fermer les yeux sur ce qui se passe à la source même de l’Islam, dans cette même Arabie où un jeune blogueur vient d’être condamné à 10 ans de prison ferme et 1000 coups de fouets aux motifs qu’il aurait insulté et renié l’islam (?). C’est le monde à l’envers, une bande de vieux tarés qui s’acharne sur une jeunesse éprise de liberté ! Malheureusement, c’est le même schéma, conforme à une espèce de géométrie fractale, qui se reproduit dans tous les pays musulmans. À l’image de ce vieillard agonisant que la France soigne et cajole et qui s’accroche désespérément au pouvoir pendant qu’il n’est donné d’autre choix à la jeunesse algérienne que celui de glisser dans le moule d’un message aliénant ou de prendre les chemins de l’exil, bien souvent au péril de sa vie.

On pourra toujours rétorquer que Benyamin Netanyahu no plus n’avait pas sa place dans ce cortège de paix. À part que Benyamin Netanyahu ne maltraite pas son propre peuple. Quant au sionisme qu’il représente, cela est une autre histoire.

Le massacre perpétré contre Charlie Hebdo aura le mérite de dessiner les contours d’une conscience républicaine plus que jamais d’actualité, ceux d’un esprit et d’une cause Charlie qui se doivent d’être partout semés, car :

Être Charlie, c’est refuser toute forme de barbarie !

Être Charlie, c’est lutter pour la liberté de penser et de s’exprimer!

Être Charlie, c’est refuser tout fanatisme et tout racisme qu’il soit politique, ethnique ou religieux !

Être Charlie, c’est perpétuer le combat de Saïd Mekbel, Tahar Djaout et bien d’autres afin que de leur sacrifice jaillisse la flamme qu’ils ont tenté d’allumer pour nous en Algérie avec les étincelles de leurs plumes.

Être Charlie, c’est refuser de célébrer la mort, en consacrant la vie !

Être Charlie, c’est accepter la provocation et la parodie sans limites pour préserver le rire, ce propre de l’homme, l’unique caractéristique qui le sépare de l’animal.  

Être Charlie, c’est ne pas se laisser charmer par des discours factices et fascistes !

Être Charlie, c’est vibrer en permanence aux rythmes de « Keep zen, say no-Lepen ! »

À l’opposé ; ne pas être Charlie, c’est souscrire à l’horreur indigne du XXIe siècle et verser dans le racisme et/ou le fanatisme primaires !

Ne pas être Charlie, c’est refuser la liberté, l’égalité et la fraternité, ces socles solides que tout monde civilisé se doit d’épouser.

Ne pas être Charlie, c’est accepter de ne plus rire et s’éloigner du propre de l’homme pour se confondre avec le monde animal. 

Osons dire, osons nous remettre en question sans nous perdre en conjectures inutiles et farfelues, comme le font la plupart des musulmans invités à s’exprimer sur les plateaux radios-télés. Expressions desquelles ressort une préoccupation unique, celle d’une inquiétude chronique quant à la  stigmatisation généralisée des musulmans de France. Bien que telle inquiétude soit légitime cela ne doit pas nous faire occulter des questions fondamentales qu’il serait mal venu d’évacuer en ces moments de questionnements qui engagent l’avenir des enfants du monde, celui de nos enfants à tous:

- L’islam est-il compatible avec le monde moderne ? La réponse est évidemment non ! Comme ne le sont pas les autres religions, à la différence, elle est de taille, que les autres religions n’interfèrent plus outre mesure dans les codes de gestion et d’interactions qui régissent la cité. 

- Il n’est pas besoin de recourir à de longs discours pour démontrer que toutes les notions modernes de liberté, d’égalité et de fraternité sont bougrement mises à mal par le contenu de tous les textes sacrés, y compris le Coran. Comment parler de liberté quand l’esclavage est reconnu et encore pratiqué comme du temps de Mahomet, et que le crime pour apostasie est soumis à la peine de mort dans de nombreux pays dont l’islam est la religion d’Etat ? Comment parler d’égalité quand la femme, l’autre moitié de l’humanité, est quasiment inexistante dans les sourates, sinon pour lui dicter une soumission aveugle et machiste à son bienfaiteur, l’homme ? Comment parler de fraternité quand, au fil des versets, on encourage le rapprochement entre musulmans et l’éloignement de l’impie, c.a.d. le reste de l’humanité, celle qui refuse la soumission et la conversion au dernier mensonge de Dieu ?

Il n’est pas exagéré d’affirmer que l’Orient et l'islam sont malades. Une maladie que l’Occident a laissé propager en entretenant des liens contre-nature avec des dirigeants cupides, rétrogrades et malveillants, et qui maintiennent leurs peuples dans un état d’aliénation primaire pour mieux les piller. Et l’Occident qui en profite bien s’en est rendu complice sans le moindre état d’âme. Il serait bien plus généreux de chercher les moyens efficaces de soigner cet islam malade de ses dirigeants au lieu de lui emboiter le pas dans une surenchère de violence et d’exclusion de tout ce qui ne ressemble pas à une jolie tête blonde. N’est-ce pas pape François ? 

À cet égard, un texte sur l’esprit Charlie ne saurait être complet sans pointer du doigt les responsables politiques qui se sont succédé aux commandes de la France depuis Charles De-Gaule, lesquels ont tous laissé parquer les ethnies maghrébines dans des cités dortoirs pour laisser germer, à foison, une désespérance collective qui a encouragé le repli sur soi de l’écrasante majorité des musulmans. Et pour reprendre une phrase à la mode : Les banlieues françaises ont bel et bien été exclues de la république ! Il faut aussi le reconnaitre pour mieux y remédier. "Cachez ces bougnoules que nous ne saurions voir !", pour verser dans la provoc et le style Charlie-Hebdo. De plus, même les maghrébins intégrés au sens universel du terme font souvent face à une discrimination insidieuse quand elle n’est pas carrément assumée au grand jour dans certains milieux professionnels. Une ségrégation qui remonte jusqu’à l’enceinte de l’Elysée avec le fameux "allez, fi- saâ !" rapporté par Azouz Begag.

Au nom de l’esprit Charlie, déballons tout, débattons de tout, mais "Keep zen, say no-Lepen !".

Quant à nous musulmans, croyants ou non, pratiquants ou non, il est temps de substituer à la foi religieuse destructrice, une foi citoyenne fédératrice pour que pétille la France des lumières et un monde que nous voulons  toujours meilleur pour nos enfants. L’Algérie et ses dictateurs militaro-islamistes nous ont chassés, il est de notre devoir de contribuer à élever la fraternité dans ce pays qui nous a accueillis pour que jamais plus d’autres Charlie ne tombent sous les balles de la folie meurtrière des islamistes.

Mais tel vœu restera vain et pieu tant que la France et le monde se refusent à comprendre que si de plus en plus de jeunes se rabattent sur le ciel et ses promesses, c’est qu’on n’a pas su leur proposer une raison de vivre sur Terre. Qui doit assumer telle déviance sociale sinon les responsables politiques qui n’ont pas su les intégrer dans le giron de la république, avec  en prime ces discours d’identité nationale mal énoncés qui ont exaspéré un communautarisme à fleur de peau de tous ces musulmans parqués dans des ghettos?

Il est long, il est loin le chemin de grâce pour tous, mais il est temps de conjuguer nos efforts pour l’accomplir et aspirer au bien-être  de l’humanité.  Et seule une liberté d’expression saine, illimitée et dépassionnée peut l’en paver.

Pour toutes ces raisons, Charlie, je le suis aujourd’hui, je le serais demain jusqu’au dernier souffle de ma vie !

Kacem Madani

Autour de Boualem Sansal

Il y a quelques années j'avais découvert un auteur algérien, ingénieur de formation, à travers la lecture d'un de ses livres, Le village de l'Allemand. Les événements récents me l'ont remis en mémoire et le hasard faisant très bien les choses, Valeurs Actuelles publie cette semaine un entretien avec le journaliste Frédéric Pons. Je n'ai pas encore lu son dernier ouvrage Gouverner avec Allah. L'intérêt essentiel de cet auteur est que celui-ci fait bien comprendre le processus d'islamisation d'un pays. Je suis désolé de le dire mais on retrouve dans Le Village de l'Allemand des thématiques de Zemmour et de Houellebecq sans pour autant tomber dans leurs outrances, cela va sans dire !

Alors Messieurs les censeurs autoproclamés je vous livre un nouvel objectif, un autre os à ronger après Zemmour, Houellebecq, Tesson, Onfray, sans doute bientôt Régis Debray, il y a Boualem Sansal. Sauf que votre ouverture d'esprit ne vous permet pas de connaître cet auteur ! Il échappe donc à votre soif d'interdire tout ce qui ne trouve pas grâce à votre perception de la liberté d'expression. Tous ceux qui réfléchissent un tant soit peu savent que plus la liberté d'expression est louée plus elle est apppelée à être restreinte et bornée.

Je vous invite simplement à bien lire la réponse que fait Sansal à la question "Quels sont les tabous à lever ?"

 

JM L

Valeurs Actuelles 15.01.2015

Valeurs Actuelles 15.01.2015

Et maintenant ?

Gouverner au nom d'Allah

NRF - Gallimard

Et maintenant ?

A lire aussi :

Le village de l'Allemand

Etre Charlie ?

Et maintenant ?

Mais qu'étions-nous avant ?

Qui suis-je ? Moi-même ou dois-je me dédoubler sous le coup d'une injonction de nos élites auto-proclamées reprise par la clameur sous forme d'un slogan ? Rappelons-nous la versatilité de nos élites ! N'y-a-t-il pas aussi confusion entre peuple de France et opinion publique ?

 

Que serons-nous demain ?

Résister c'est ne pas se soumettre au terrorisme, c'est refuser l'obscurantisme. Oui ! C'est aussi être libre de croire, libre de penser comme nous l'avons toujours pratiqué, y compris en ne reculant pas devant les paradoxes de la réflexion. Et continuer à être nous-même quelles que soient les circonstances.

 

JM L

 

Ce dimanche, nous sommes allés de la République à la Nation. Ces noms n’étaient pas seulement des toponymes. Ils redevenaient un programme. Tel est le message qu'il nous faudra garder à l'esprit : le grand vaincu de cette journée historique ne fut pas seulement le terrorisme, ce fut aussi le communautarisme.

 

© Jacques Julliard

Les Français sont un grand peuple. Nous l’avions oublié. Ils l’avaient oublié. Et puis, tout à coup, l’espace d’un week-end, cette formidable explosion de patriotisme, la Marseillaise et les drapeaux tricolores, depuis longtemps confinés aux terrains de sport, les cris de « vive la France » qui éclatent d’un peu partout. La République et ses valeurs, que d’aucuns avaient décrétées ringardes, revendiquées avec force, avec conviction. Oubliées les fausses pudeurs du cosmopolitisme. Et les signes politiques, tous les signes politiques, gentiment priés d’aller se faire voir ailleurs.

Gentiment. Dans les manifs politiques, syndicales ou culturelles, il est de bon ton d’afficher une virilité bourrue. Dimanche, c’était autre chose : les gens, imaginez-vous cela, étaient polis. Ils se respectaient. Ils se considéraient. Quand ils se heurtaient malgré eux, ils s’excusaient ; ils faisaient place aux voitures d’enfants, aux vieilles personnes. Un million de personnes ont défilé dans l’ordre, sans slogans imbéciles, sans une bousculade, sans un incident, sans casseurs de fin de parcours. J’ai vu non loin de moi, une vieille dame en astrakan, svelte et droite, défiler auprès d’un « jeune » habillé en rappeur, pantalon bouffant taille basse. C’était le métro à 18 heures. On avait, pour un jour, aboli les classes sociales, sans Marx, sans les sociologues, sans la révolution. A moins qu’il y ait là l’amorce d’une révolution. Ou mieux encore, tenez : le souvenir de la Révolution, qui n’a pas besoin de millésime et qui se contente d’une majuscule.

Nous allions de la République à la Nation. Ces noms n’étaient pas seulement des toponymes. Ils redevenaient un programme. Ce programme, cet idéal s’appelaient unité. Et même, unité ou barbarie.

 

Le voilà, le message. Celui que tous les politiques, tous les intellectuels, tous les travailleurs sociaux devront désormais se bien mettre dans la tête, sous peine de rater la signification historique d’une manifestation sans précédent dans l’histoire contemporaine : le grand vaincu de dimanche ne fut pas seulement le terrorisme, ce fut aussi le communautarisme. Le communautarisme est cette doctrine absolument étrangère à l’esprit français, à l’esprit de la Bastille, à l’esprit de la Révolution qui prétend que les individus appartiennent d’abord à des communautés originelles à base ethnique ou religieuse, et que la nation n’est rien d’autre que la fédération de ces communautés. L’exemple type est le Liban où les communautés religieuses, maronites, chiites, sunnites, druzes sont reconnues comme telles par les institutions politiques. Le résultat, on le connaît : dans ce beau, ce cher pays du Cèdre, tout débat politique tourne à la guerre de religion.

 

De tout cela, nous ne voulons pas. Le peuple de France a dit dimanche qu’il n’en voulait pas. Il est attaché à une France laïque, qui ne fait pas acception de personnes, qui ne reconnaît que des individus, et non des communautés, conformément au mot célèbre du Comte Stanislas de Clermont-Tonnerre sous la Révolution : « Il faut tout refuser aux juifs comme nation ; il faut tout leur accorder comme individus ; il faut qu’ils soient citoyens ».

C’est, contre tous ces communautarismes dévoyés, qui ne conçoivent au fond la vie politique que sous la forme de la guerre de tous contre tous, ce que nous appelons intégration. A la différence de l’assimilation, qui prétend réduire le nouvel arrivant à tous les usages de l’ancien habitant, l’intégration concerne tout le monde : elle est un effort pour dégager des manières de vivre ensemble, communes à tous, et acceptables par chacun.

Il faut que cela soit bien compris par chacun, à commencer par les intellectuels dont j’ai le regret de dire qu’ils ne sont pas actuellement les membres les plus intelligents de la communauté nationale : c’est l’intégration, c’est-à-dire l’acceptation de règles communes, de mœurs communes qui permet aux différences individuelles de s’exprimer sans remettre en cause la seule communauté acceptable, c’est-à-dire la communauté nationale. La laïcité n’est pas seulement la paix ; qu’on se le dise, elle est aussi et peut-être d’abord la liberté. Liberté des consciences, liberté des opinions.

 

C’est ici que nous rencontrons l’islam. Pourquoi l’islam ? Parce qu’elle est en France la dernière venue des grandes religions nationales. Le protestantisme et le judaïsme, qui furent discriminés et souvent persécutés sous l’Ancien Régime, ont compris d’emblée que le statut d’indifférenciation que leur offrait la Révolution était pour eux un progrès et même un idéal.

Avec le catholicisme, le débat fut beaucoup plus rude et tourna même à l’affrontement. Religion privilégiée, véritable religion d’Etat sous l’Ancien Régime, il lui fallut un siècle et demi pour accepter la laïcité. Pas plus que l’islam d’aujourd’hui, l’Eglise d’hier n’acceptait la séparation de l’Eglise et de l’Etat avec toutes ses conséquences. Après un long affrontement, l’Etat finit par faire admettre par les catholiques les règles qui président à la paix dans la cité.

 

Nous en sommes là. Beaucoup de Français musulmans, dans leur for intérieur, acceptent ces règles du vivre-ensemble que nous appelons la laïcité. La plupart des autorités religieuses de l’islam pensent de même. Il y a pourtant, de la part des plus intégristes et des plus prosélytes, une tentative tenace pour obtenir des statuts particuliers, au chapitre de l’alimentation et du vêtement, ces deux matières dont toutes les religions se servent pour imposer leur particularisme. La bataille est en cours, et si l’on adhère aux considérations développées plus haut, on conclura qu’il ne faut pas céder. Notre vivre-ensemble en dépend. Beaucoup, parmi les intellectuels culturalistes, sont au contraire partisans de la composition. Ils craignent que toute stigmatisation du prosélytisme musulman entraîne des réactions racistes. Cela part d’un bon naturel, mais manque sa cible. C’est au contraire l’affirmation d’un communautarisme musulman qui risque d’entraîner dans le reste de la population des réflexes racistes.

Mais il y a plus grave. Il y a désormais le djihadisme et le terrorisme. On a eu raison de marteler depuis une semaine : pas d’amalgame ! Identifier l’ensemble des musulmans au terrorisme serait à la fois une faute et un crime. Il faut saluer le sang-froid et la maturité de ce peuple de France qui est sorti dans les rues pour crier à la fois son horreur du terrorisme et son calme refus de toute forme de culpabilisation collective.

Pour autant, n’y a-t-il « rien à voir » entre l’islam et le djihadisme ? Oui, à la façon dont il n’y avait jadis « rien à voir » entre le christianisme et les croisades…

 

Laissons donc de côté les doctrines. Je me garderai bien de prétendre les juger. Mais, dans la pratique, il y a des interprétations pacifiques et des interprétations belliqueuses du Coran. En France même, ces interprétations se combattent, comme du reste dans le monde entier. Ce conflit des interprétations s’est traduit dimanche par une participation assez modeste des musulmans. De petits groupes courageux se sont manifestés. Ce ne fut pas un grand raz-de-marée pour condamner le terrorisme. Les jeunes musulmans des banlieues, dans leur ensemble, n’étaient pas là. Pourquoi ? Par peur, sans doute. Non de la vindicte des autres manifestants, mais plus probablement des représailles à encourir lors du retour dans les quartiers et les banlieues. Dans les écoles, la minute de silence en l’honneur des journalistes de Charlie Hebdo, ces martyrs de la liberté, s’est heurtée à de nombreuses résistances. La ministre de l’Education nationale nous en fera-t-elle le bilan ? Il faudrait bien se décider un jour à voir les choses en face, au lieu de regarder ailleurs.

 

En ce sens, une grande occasion de fraternisation a été manquée. La manifestation monstre de dimanche aurait pu être l’occasion d’un grand tournant historique, comme le fut le 14 juillet 1790 la fête de la Fédération, quand toutes les composantes de la nation française convergèrent au Champ-de-Mars pour proclamer la France une et indivisible.

C’est dire le travail qui reste à accomplir. La tentation terroriste ne sera vaincue qu’avec la collaboration active des musulmans de France et leur adhésion ouverte et massive aux valeurs de la République. Il n’y a pas d’autre chemin. A ceux qui prétendraient, comme on le fait tous les jours de façon paresseuse, qu’une telle adhésion suppose d’abord l’égalité économique, sociale, mais aussi culturelle avec le reste de la population, je réponds qu’à ce compte, jamais intégration entre deux populations d’origine et de conditions différentes ne se serait réalisée.

Reste que dimanche, un grand événement a eu lieu. Il me semble que le peuple de France, de Paris et de toutes les régions, a voulu malgré son silence, et plus encore grâce à son silence, dire trois choses.

>>> D’abord sa solidarité avec nos compatriotes juifs, une nouvelle fois victimes du fanatisme islamique. Que cette manifestation soit un coup d’arrêt à cette double montée de l’antisémitisme, dans le vieux fond réactionnaire de la droite française et dans les banlieues immigrées. L’année dernière, près de 7 000 de nos compatriotes ont choisi de quitter la France. Faisons tout pour arrêter ce mouvement, inspiré par la peur et le découragement. Je le demande, que serait la France sans ses juifs ?

>>> Ensuite, son attachement indéfectible, inconditionnel à la liberté de pensée et d’écrire. Alors que les événements tragiques que l’on sait se déroulaient, de vrais sycophantes, déguisés en critiques littéraires, ne craignaient pas de dénoncer de façon répétitive quasi hystérique « l’islamophobie » de Michel Houellebecq au risque de le désigner aux balles des tueurs. Comme hier on dénonçait, pour les mêmes raisons, « l’irresponsabilité » de Charlie Hebdo. La liberté est indivisible ; il faut la défendre jusque dans ses excès. Il ne suffit pas « d’être Charlie » un beau jour d’émotion nationale et de manifestation patriotique. C’est tous les jours qu’il faut être Charlie, c’est tous les jours qu’il faut rester Charlie !

>>> Enfin, la réaffirmation de l’identité populaire. Qu’on me permette ici un mot personnel. J’ai publié récemment, avec Jean-Claude Michéa, un échange de lettres entre lui et moi, à propos des rapports de la gauche et du peuple. Et nombre de nos lecteurs, jugeant nos réponses insuffisantes, nous ont demandé : « Qu’est-ce donc, à la fin, que ce peuple dont vous parlez ? » Question légitime, question nécessaire. Et réponse difficile ! A tous ceux-là, et à tant d’autres qui se posent des questions semblables, je dis : regardez ces manifestations. Regardez ces foules dans les rues ne répondant à aucun autre appel qu’à celui de leur conscience et de leurs convictions. Regardez ces foules de Paris, de Lyon, de Toulouse, de Bordeaux, de la plus petite de nos bourgades. Vous cherchez le peuple de France ? Eh bien ! Le voilà !

 

© Jacques Julliard © Marianne

 

Les manifestations à Alger

tout ça pour une caricature ? Allons donc…

 

Les manifestations d’Alger et ailleurs, excepté Constantine (moins d’une centaine de personnes), ont surpris par au moins cinq choses.

 

 

© Le Matin

Un, elles ont rassemblé plusieurs milliers de personnes. Deux, les mots d’ordre scandés comme le fameux "Alayha nahya oua aleyha na mout wa alayha nalqa Allah" (Pour l’islam je vivrai pour l’islam je mourrai et je rencontrerai Dieu), rappellent un autre temps (ils nous ont ramené 15 ans en arrière). Trois  – cela frappe l’observateur averti – il ne s’agissait pas d’une simple réaction de colère, spontanée, comme certains cherchent à le faire croire, mais d’un mouvement organisé : les manifestants convergeaient de plusieurs mosquées squattées par les salafistes, dont une dans le quartier de Belouizdad où prêche le repenti Abdelfatah Hamadache (l’homme qui a demandé la peine de mort contre Kamel Daoud), vers le centre-ville d’Alger. Quatre : ces manifestations ont bénéficié d’une couverture médiatique presqu’en direct par Ennahar-tv. Cinq, les autorités ont laissé faire : on a même assisté à un remake de la fameuse marche d’octobre 1988, partie de la mosquée Kaboul de Belcourt : arrivés à la place du 1er Mai, les forces de police ont laissé passer les protestataires, exactement comme en octobre 1988 avant que cela ne se termine, à l’époque, dans un bain de sang devant le siège de la direction de la police nationale à Bab El Oued !

On notera que la manifestation organisée par les salafistes n’a pas été formellement interdite comme cela avait été le cas pour les forces démocrates en février 2012. A l’époque - j’y étais – le pouvoir politique n’avait pas hésité à mobiliser 30 000 policiers (sans compter les provocations des "baltaguias") pour empêcher la marche des démocrates et progressistes (un peu plus de 3000 personnes) réclamant des changements démocratiques : une interdiction qui avait  dissuadé de nombreux Algériens de répondre aux appels des partis démocrates et de la société civile. Même cas de figure, en février-mars 2014, pour empêcher le mouvement Barakat d’exprimer son refus d’un quatrième mandat.  

Face à cette situation, on ne peut être qu’interpellés par l’indulgence et la tolérance coupables dont ont fait montre vendredi dernier les autorités envers les salafistes. Certes, rétorquera-t-on, la police a fini par disperser à coups de matraque et de gaz lacrymogène les barbus. Mais, elle ne l’a fait que parce qu’ils se dirigeaient vers le siège de l’APN (Parlement), avant de tenter de rallier Bab El Oued, comme en octobre 88.

En résumé, tout s’est déroulé comme si les dizaines de milliers d’Algériens morts durant les années 1990 des tueries revendiquées par les islamistes – les fatwas, les documents écrits, visuels (vidéos) et sonores existent – n’avaient servi à rien. Il faut ajouter que la promulgation de la loi sur la paix et la réconciliation nationale a institué une véritable culture de l’oubli en interdisant formellement, sous peine de poursuites judiciaires, d’évoquer les crimes innommables dont se sont rendus coupables les dijhadistes ayant accepté de déposer les armes et qui sont de faux repentis : il ne leur était pas fait obligation de se repentir et encore moins de demander pardon à leurs victimes. Qui plus est, les autorités ont fermé les yeux – sans doute selon un accord non écrit – sur la possibilité de réoccuper les espaces et les mosquées. L’interdiction de la prière dans la rue a été levée ainsi que la liberté de prêche. Qui plus est, alors qu’on interdit de parole les porteurs de progrès et de modernité, les Hamadache, Chemseddine et consorts s’expriment librement, appellent à fermer les débits de boisson alcoolisées, à interdire les spectacles, à faire la chasse aux femmes qui ne portent pas le voile et à interdire le bikini sur les plages comme si la côte algéroise (ou oranaise) était comparable à la Costa del Sol espagnole !

En tout cas, le message délivré vendredi à Alger est clair : ce mouvement, qui est en train de se reconstituer sur les décombres de l’ex-FIS, n’a pas renoncé à l’Etat islamique.

H.Z.

N. B. Parenthèse : pourquoi les Hamadache, Chemseddine et consorts, n’ont-ils jamais lancé d’appels à interdire la chasse à l’outarde et aux gazelles (espèces protégées, menacées de disparition) pratiquée par les émirs des pétromonarchies du Golfe dans le sud algérien ?

 

© Le Matin

La cité des zombies

L’auteur du livre «Le Meilleur des mondes», Aldous Huxley, affirme qu’un mensonge répété 64000 fois devient vérité. Il ne nous dit pas ce que devient une vérité répétée 64000 ni pourquoi 64000. Le proverbe populaire qui ne s’embarrasse de l’obésité des nombres prône le profit dans toute répétition. Les experts de la Propagande et de la Pub l’ont bien compris.

 

© Le Matin Algérie

À force d’entendre une rengaine, on en fait un tandem. C’est ce qu’Ignacio Ramonet nomme modestement "les Propagandes Silencieuses" en se demandant déjà en 1970 comment sommes-nous influencés contrôlés conditionnés par ce funeste rabâchage. Sous hypnose, du berceau à la tombe grâce à l’école, la télévision, la radio, les journaux, les magazines, les livres, les spots, les films, les séries, les CD, DVD, les jeux vidéo, l’internet, les réseaux sociaux, asociaux etc. Aucune échappatoire. Toutes nos pensées sont cernées par ce bracelet électronique que manipule une poignée de plus en plus restreinte de nababs. Pourquoi ? Pour nous empêcher de réfléchir un peu et les pendre au premier arbre venu. La médecine en analysant le cerveau humain a dénombré trois couches superposées ; trois cerveaux. Le premier nous vient de nos ancêtres les reptiles datant de 400 millions d’années, un cerveau animé par les instincts archaïques du prédateur, de la proie. Le deuxième limbique, héritage des mammifères soucieux de veiller à la survie de l’espèce, la protection des petits. Et le dernier cerveau, le néocortex, siège de la logique, de la pensée abstraite. Donc si la Nature ou Dieu ont jugé utile de les garder tous c’est qu’aucun n’a réussi en solo le test à 100%.

Quand on a demandé à Einstein d’expliquer sa réussite, il a répliqué : "Dieu est subtil, mais jamais malveillant." Mais de là à ce que le cerveau dinosaurien prenne le dessus et les commandes, l’idée ne l’a sans doute jamais effleurée, lui le timide le pacifiste le musicien et l’inventeur malgré lui de la bombe atomique. Aujourd’hui Einstein serait au mieux devenu le robot d’un laboratoire militaire à supposer que son génie ait pu éclore avec ce matraquage ionique et ce désenchantement universel. En 1994 dans Pax Mafiosa, Claire Sterling se posait la question: "les Multinationales du crime vont-elles s’emparer du pouvoir au niveau mondial ? La question ne se pose plus. Au sommet de leur Olympe, les faux dieux ont atteint leur but en finançant les campagnes des politiciens dits démocratiques pour gouverner avec leur complicité. Comment éviter le 11 septembre, le massacre de la masse, des journalistes des caricaturistes, comment éviter les bulles de Wall Street, la pollution de la planète, le gaz de schiste, la disparition des espèces protégées, la haine des jeunes, la peur des vieux… ? On sait que l’enquêteur ne peut s’empêcher de se dire à qui profite le crime ? Mais la règle n’est pas mathématique. Exemple la jeune veuve éplorée couchée dans le testament n’est pas nécessairement celle qui tient l’arme, elle n’est pas aussi nécessairement celle qui ne voit rien venir… Qu’il s’agisse du terrorisme qui tue des enfants ou celui qui transforme les femmes en esclaves sexuels et les blonds captifs en compte en Suisse, aux bombes dans les souks les bus les avions et les lieux de culte au nom d’un ciel commun à tous, on ne compte plus les victimes ni les «protecteurs» qui n’ont rien vu venir. Depuis le 11 septembre et malgré le serment de la Maison- Blanche de faire la guerre à ces guerriers de l’apocalypse, ils se sont multipliés à travers le monde faisant des musulmans leur principale chair à pâtée malgré leur réislamisation. Aujourd’hui Obama, parlant de l’EI (État islamique) reconnaît que la guerre sera longue de 10 à 15 ans. Il aurait dû se taire, pas besoin d’affirmer que même la première puissance mondiale ne peut faire de miracle. Les guerres coûtent cher et durent le maximum : une décennie. Donc le terrorisme va mourir de sa belle mort avant de ressusciter aussi naturellement.

En Algérie, on a connu l’horreur et sans doute demain nous allons replonger, tous les indices sont là malgré la Réconciliation signée par la Régence d’Alger. Le terrorisme est inévitable, sans alternatif économiquement parlant et politiquement bien payant. «Protégez-nous simplement !» Quand un peuple demande la sécurité avant la liberté, c’est qu’il a déjà perdu son humanité. Qui sont les héros de l’Histoire ? Des guerriers. Qu’offre-t-on à jouer aux enfants de nos jours ? Des armes pour les garçons et des poupées Barbie pour les fillettes. Les symboles de l’éducation se résument au guerrier et au repos du guerrier. Violence et soumission. Verser le sang de la masse en sacrifice. Le coup est double : renforcer le trône et les chaînes. La révolte populaire est devenue à la longue un leurre. Depuis la Seconde Guerre mondiale, ceux qui mènent le monde ont bien compris qu’ils doivent s’unir pour garder indéfiniment le pouvoir. Les trois lettres de l’ONU et surtout la mondialisation ont donné au sommet une voix unique. L’image nous revoie toujours des présidents qui se font des mamours, rient des lèvres et des yeux alors qu’ils entretiennent la haine entre leur peuple sinon l’indifférence du moins une concurrence déloyale. Partout, ils sont chez eux et partout la populace est étrangère, déracinée même sur son propre sol. Dans l’affaire Charlie, ils ont joué la comédie de la marche dans la plus belle avenue du monde cernés de caméras, mais loin de la foule malgré leur bataillon de gardes du corps, la police et l’armée de la République. Dans le pays de l’Égalité, un déséquilibré aurait pu se faire exploser dans la masse des gueux, mais impossible parmi les élites. Pourtant, ces derniers sont les serviteurs censés assurer la sécurité de tous. Pour cela, ils sont grassement payés et bien choyés occupant les palais des anciens rois décapités …

En écho, les barbus enflamment les ruelles du monde arabo-musulman brûlant des drapeaux et des figurines. Pour l’occasion, Alger a anesthésié sa Garde pour faire vibrer ses rues vierges et ensoleillées sous les pas du FIS ressuscité tel un sphinx sans énigme. Tout est pardonné et rien n’est pardonné. Les frères Kouachi ont sauvé l’honneur du Prophète. Qui sauvera les musulmans de la peur des autres ? Un imam en Suisse a lancé l’idée d’un temple pour les trois religions monothéistes, ses collègues ont lancé illico une fatwa contre lui pour le destituer de sa fonction. La Suisse, mosaïque de cultures de races de religions et de langues, possède une démocratie participative qui appelle les citoyens à consacrer parfois tous leurs samedis au vote. Gageons que l’État suisse se contentera de dépenser de l’argent pour protéger la vie de ce «renégat» au lieu de demander l’avis des électeurs sur cette affaire. Le philosophe hindou Ram Swarup écrit dans Foi et Intolérance : "Dieu vient à ceux qui le cherchent sincèrement. Il ne respecte ni les personnes ni les titres. Il est évident que dans cette approche il n’y a pas de place pour des révélations exclusives, un Fils unique ou un dernier Prophète…Dieu a fait l’homme à son image. Mais, inversement, l’homme fait Dieu à son image. De ses ambitions, de ses haines, de sa sensualité et de ses intérêts il fait un petit dieu ; ensuite il le met sur un piédestal et l’adore ; non seulement il l’adore, mais il force les autres à l’adorer." Les adeptes du yoga de plus en plus nombreux dans le monde médical et dans le monde tout court semblent donner raison au philosophe. Et si pour une fois on cherchait le conflit à l’intérieur de nous-mêmes pas à l’extérieur ? Apparemment le buste de Gandhi en Occident lance dans le vide cette phrase : "The word is my family". La France déclare la guerre aux assassins qui ont fait gagner plus de 20 points à son président ressuscité et rêvant d’un second mandat. Comme pour Bush et le 11 septembre, le système algérien, le terrorisme se comporte comme la crise économique : il renforce les dominants et lamine les dominés. Les frères Kouachi sont morts avant de parler, c’est vrai qu’ils n’avaient rien à révéler aux autorités concernées comme tous les terroristes qui les avaient précédés. Contrôlés suivis espionnés et plus riches et mieux équipés que les policiers de la 5e (6e) Puissance mondiale. Récemment en Belgique un policier masqué a dénoncé à la télé les fausses balles de son arme de service et le gilet pare-balles qui ne le protège que contre le froid. Heureusement, dans le pays de Brel, les chiens munis de caméra sont dressés pour affronter en premier le danger. En France, en Belgique, aux USA ou en Algérie, la police semble être un barrage bien fragile et bien commode. Ce n’est pas étonnant qu’elle soit la première cible des terroristes la première responsable des bavures et la première dans les statistiques sur le suicide. Les 3 policiers morts en France tous d’origine étrangère et le discours officiel parle comme d’habitude de racisme, d’islamophobie, d’antisémitisme, d’apartheid, de ghetto et de nouvelles lois répressibles etc. Tous les mots à fracturer un peu plus une société française déjà en lambeaux. Pas de regret, ni de doute, d’excuses encore moins une quelconque démission, pas un mot de reproche aux pays amis qui financent et arment les terroristes.

À chaque tuerie, nous avons le même scénario qui se répète jusqu’à l’écœurement. Le va-t-en-guerre des politiciens pataugeant allégrement dans le sang des victimes et l’unanimité de la presse aux ordres. Sans oublier le rôle des prédicateurs payés par des dictateurs pour enflammer une jeunesse perdue qui sert aussi bien à tuer à se faire exploser qu’à brûler des drapeaux au rythme des fatwas et des satellites qui assurent la bonne connexion et les complots à outrance. On aurait aimé que ces foules descendent dans la rue pour protester contre les villages dévastés semés de cadavres après le passage de Boko Haram, les écoliers assassinés par centaines en Afghanistan, les attentats quasi quotidiens en Irak contre les chiites, sans oublier les victimes du terrorisme dans une Algérie traumatisée à vie, 100 % sunnite et épargnée par l’invasion étrangère. On aurait aimé une solidarité avec la Kabylie pour un peu de démocratie de racines, pour la protection des Mozabites, contre le gaz de schiste avec les sudistes… Un zombie peut-il défendre un autre zombie ? C’est compliqué pour un malade de jouer au toubib. Pas étonnant qu’aucun printemps arabe n’ait réussi à prendre. Exemple, la question n’est pas pour ou contre le gaz de schiste, mais pourquoi le gaz de schiste dans un pays imbibé de pétrole à plus de 90% désertique sur une planète polluée et surchauffée. On est consterné quand on voit qu’un pays comme la Norvège qui a tellement de pétrole qu’elle l’investit à l’étranger pour ses générations futures va débarrasser gratuitement l’Angleterre de ses déchets pour les transformer en énergie afin de chauffer ses villes.

L’Algérie croule sous ses poubelles, seulement elle n’a pratiquement pas de relation économique avec les pays les moins corrompus au monde, les pays nordiques, pour la conseiller. C’est la corruption qui fait le lien entre le gaz de schiste "Je suis Charlie" ou "Je suis le Prophète". Que serait le wahhabisme sans les pétrodollars et les pétrodollars sans wahhabisme. Où en serait la démocratie occidentale, la dictature orientale sans les pétrodollars. Il n’y qu’à voir comment se sont précipités les maîtres du monde pour se recueillir sur la dépouille du roi d’Arabie saoudite l’encensant tel un messie de paix de tolérance et d’œuvres grandioses alors qu’il a accédé au trône en vieillard moribond. Même les chaînes arabes pour enfants ont pris le deuil. En Israël, la télévision publique se permet de diffuser une série blasphématoire qui se moque du judaïsme sans que ses intégristes brûlent Tel Aviv. Pour éviter d’être la cible des terroristes islamistes, les juifs fuient la France quand vont-ils produire des terroristes et cesser de décrocher des prix Nobel pour ressembler aux cousins ? Après le 11 septembre, les Américains ont mis de l’argent dans l’école saoudienne pour l’épurer de la violence qu’elle distille dans le cerveau des enfants, 14 ans plus tard, le chaudron saoudien n’est neutralisé que grâce aux bases militaires de l’Oncle Sam. Pourquoi le Qatar a dépensé plusieurs dizaines de milliards d’euros dans les banlieues parisiennes ? Pour sauver les jeunes beurs de la famine dans une France mondialement enviée pour son système social ? À défaut d’affronter l’Iran, armée contre armée, sa rivale, l’Arabie Saoudite déstabilise le monde en fabriquant des terroristes hors de son territoire.

Les Saoudiens adorent acheter des armes, mais ne savent plus faire la guerre ; les veinards ont des serviteurs tout confort. Et dire que Khomeiny reprochait aux Ibn Saoud d’accaparer les bénéfices du pèlerinage censé profiter à tous les musulmans. S’il avait eu plus d’écoute de la part de ces derniers, la dynastie saoudienne hésiterait aujourd’hui à jouer avec le prix du pétrole qui fait dire à certains spécialistes que même à 10 dollars le baril, elle serait gagnante tellement est inépuisable la baraka de la Kaaba… En s’accoquinant aux wahhabites sunnites, l’Occident a préféré l’ami bête à l’ennemi intelligent. Certes la démocratie athénienne n’a jamais existé ni à Paris ni à Washington, mais il y a le jour de l’élection où le peuple se fait illusion. Exemple les Français étaient contre la suppression de la peine de mort, contre l’avortement, contre l’Europe… ce qui n’a pas empêché leurs élus de signer des lois contraires. Prenons par exemple la peine de mort, elle concerne combien de personnes, une minorité. Les socialistes humanistes ont décidé l’abolition en abolissant la perpétuité en douce. Il est plus rentable d’épargner un bourreau que de se faire du souci pour sa prochaine victime. En Algérie, il vaut mieux être émir repenti que patriote déçu.

En Belgique, un "danger public", fatigué d’être derrière les barreaux, a demandé à être euthanasié. L’Etat refuse et se résigne à lui garantir un traitement dans un centre en Hollande jusqu’à la fin de sa vie : au moins 1000 euros par jour payés par le contribuable. C’est sans doute pour cela que les terroristes en France sont tués systématiquement, ça coûte moins cher et un procès peut s’avérer dangereux. Les Américains aussi ont tué Ben Laden dans son lit. Il a emporté son secret avec lui et l’argent est sommé de consoler si nécessaire les familles qu’il a endeuillées…

Pour ou contre la peine de mort ? Pour ou contre le gaz de schiste ? Pour ou contre Charlie ? Pour ou contre Bouteflika ? Pour ou contre le mariage pour tous ? Pour ou contre la parité? Pour ou contre la charia ?... Ces questions n’ont aucun sens. Elles sont dangereuses pour une foule abrutie par la manipulation. Mais du pain béni pour celui qui les pose. D’emblée la discussion est bloquée par un quitte ou double. Pour ou contre est la question vicieuse par excellence. Elle assure à la foule sa division et démocratise sa terreur. Dans le cerveau, seule la couche reptilienne dépourvue du venin défensif subsiste. Ce qui implique la prolifération des cités de zombies un peu partout malgré l’urgence d’un éveil …

Mimi Massiva

En Algérie, le problème est dans les mentalités !

Et voilà que le temps des vaches maigres s’annonce à grands fracas.

 

© Le Matin Algérie 28.01.2015

Les prix du baril du pétrole ont baissé, l’atmosphère internationale n’augure pas de belles surprises, les cartes de l’alternance au pouvoir sont rebattues à l’intérieur, la phraséologie des réformes et des grands chantiers en prend un sérieux coup et, enfin, le nuage de toutes les illusions entretenues par les uns et les autres s’est dissipé. L’Algérie monochrone et à tête malade ayant réincarné le rôle de la cigale dans "la fable de la rente" regrette aujourd’hui le génie et la persévérance de la fourmi. Mais rattrape-t-on en un tournemain le temps perdu quand, depuis des décennies, on n’a adopté aucune stratégie pour sortir de notre dépendance alimentaire, économique, intellectuelle, etc.? Difficile d’imprimer une teinte cohérente à ce que nous pensons ou faisons. Car, en apnée mentale, le pays vit une fantaisie cartoonesque où les remous de Ghardaia, la protesta anti-gaz de schiste de In-Salah et le dernier rappel à l’ordre bondieusard d’Alger synchronisent, à notre corps défendant, une dynamique de métamorphose sociopolitique nouvelle dans une carte régionale fragile. L’analyse des faits est encore délicate au moment où j’écris ces lignes tant que cette tempête n’a pas donné de signes de "happy end". Passons donc, en attendant, à autre chose : le problème des mentalités. Mais pourquoi exactement cette thématique ?

Je pense que, comme tout pays du Tiers Monde, l’Algérie en souffre. Or, si l’on veut changer ne serait-ce qu’un aspect de cette crise complexe qui nous ravage, il faudrait d’abord commencer par la réforme des cerveaux, une finalité qui devrait s’inscrire dans le droit fil du combat de tous les jours. En effet, l’élan de notre société est cassé et tout ce qui nous entoure s’est brusquement arrêté en amont aux petits calculs politiciens et en aval à la toile des préoccupations ordinaires, inflation vertigineuse et pouvoir d’achat à la dérive obligent. Les algériens à la périphérie des enjeux tracés d’en haut, ne pensent plus désormais à construire une société et les dirigeants se vantent à peu de frais d’être épargnés par la tornade du printemps arabe, arguant que le peuple a subi de terribles épreuves qui l’ont forgé et instruit sur les dérives de la précipitation et des soulèvements incontrôlés. En agissant ainsi, le pouvoir soucieux de sa propre survie se perd en conjectures, réveillant d’une part chez le citoyen lambda l’esprit de patience et de générosité qui est à même de le préparer au moins psychologiquement à son plan d’austérité économique et, d’autre part, il anesthésie le désir de celui-ci "le citoyen" de s’autocritiquer lui-même déjà et de critiquer ses élus, ses responsables et son gouvernement. Peu crédibles à tous points de vue, toutes les initiatives étatiques de ces dernières années corroborent, du moins en partie, le cliché de «l’immaturité du peuple au changement». En plus, au tranchant de deux époques (le socialisme trop protecteur des années 1970-80 et libéralisme sauvage et indifférent à partir des années 1990), l’algérien a perdu les trois tiers de sa lucidité.

Tombé en délicatesse avec les notions du civisme, des droits et des devoirs, il ne dispose que d’un logiciel, du reste efficace, pour intercepter les méchantes rumeurs que l’on sème çà et là pour parasiter sa conscience et pérenniser un système poussif. En revanche, cet Algérien-là succombe aux excès de la passion dans une verve plus proche de l’hallucination que de la réalité. A sa grande surprise, il découvre que tout ce pour quoi des générations entières sont sacrifiées n’est que de la pure perte. Rien à redire à tout cela sinon que les algériens se sont transformés en opposants de ce dont, par ailleurs, ils prétendaient des années durant être des adeptes, voire des pionniers. Autrement dit, vu les désenchantements antérieurs et tout ce qui s’est passé à partir de 2011 dans la région, la démocratie est devenue le reflet d’un chaos à venir après avoir été un idéal à conquérir.

A vrai dire, le processus contagieux de la régression a auparavant déjà touché les comportements, en subvertissant les manières d’être, de regarder l’autre et de se mettre en rapport avec lui. La superficialité est devenue par exemple un paramètre de reconfiguration de l’architecture mentale du jeune de la banlieue algéroise comme de celui de l’arrière-pays, en ce sens que la ruralité n’a pas été apprivoisée dans l’objectif de «la citadinisation des espaces» mais dévitalisée de ses qualités primordiales propres à savoir l’hospitalité, l’entraide, la bonhomie, le courage et la bonté pour ressortir par effraction de sa bulle originelle en relents de voyouterie, de sauvagerie et de délinquance. Ainsi le paraître vestimentaire ou physique s’est-il mué en un simple "pare-être" psychologique pour emprunter l’excellente expression de l’anthropologue Marc Perreault et le matérialisme sur fond de moralisation ne traduit-il qu’un "copier-coller bricolé"» de l’hypocrisie sociale et de la corruption à géométrie variable. Dans cette bourse de valeurs travesties, le pauvre citoyen, livré à lui-même, essaie de ramer vers le large, se soulageant de la vague, creuse et ennuyeuse, de la routine et se gardant bien, faute d’appuis bien évidemment, de faire le diagnostic de lui-même et de sa société. En quelque sorte, chez lui ce qui est d’ailleurs très pathétique, l’évitement, voire l’omission du problème est une façon de l’appréhender, de le vaincre et de le dépasser. Hélas, un effet de foule anarchique doublé d’un individualisme exubérant ont ratatiné l’individualité, la liberté de pensée, l’indépendance et l’autonomie de l’algérien actuel !

Afin de mieux projeter de la lumière sur cette dialectique "individualité-foule", je m’en remets à un exemple que je trouve illustratif. Dernièrement un ami affligé par tant d’années d’exil subi dans la solitude m’a raconté son extrême stupéfaction de ce qu’il avait dû constater, la mort dans l’âme, en Algérie. Le désintéressement à l’autre, à l’environnement, au vivre-ensemble et à tout ce qui est relatif à la culture est incontestablement une seconde nature chez les nôtres «dans ma famille, pourtant tous des lettrés mieux que moi et ayant des professions libérales, ça sent le renfermé, personne ne lit ni ne tente de comprendre ce qui se passe au pays ! J’en reste coi. On dirait que je vis dans un autre monde. Et dès que l’on se met à table pour manger ou parler, la pauvreté de la discussion fait le vide autour de nous, je m’accroche quand même faisant semblant de m’y intéresser mais m’ennuie vite et décroche" me confesse-t-il, une larme de nostalgie à l’œil. "Mais pourquoi ne lisent-ils pas ? Et pourtant, ils sont assez aisés et ils en ont les moyens ?" L’interrogeai-je curieux "Tu sais qu’en Algérie, ce phénomène d’illettrisme systématique est presque normal puisque la vision de la société d’antan a changé, celui qui a fait des études s’inspire et suit des schémas de réussite de ces fortunés martiens sans culture qui construisent des châteaux et roulent en voitures de luxe soit grâce à la corruption ou aux crédits de l’A.N.S.E.J, c’est-à-dire l’inverse de ce qui doit se passer, et le résultat est là". Dépeignant un tableau acerbe de l’Algérie de nos jours, mon interlocuteur ajoute à son réquisitoire une anecdote qui l’avait à jamais marqué dans un de ces fameux cafés d’Alger la blanche "impeccablement vêtus, les deux gars qui étaient attablés en face de moi parlent fort politique et business mais oublient tout de même de rappeler au serveur qu’en tant que clients la propreté de leur table est impérative avant qu’il s’y installent, et que dans un lieu public pareil, deux verres de cafés ne se servent jamais avec une seule cuillère que l’on trempe dans l’eau pour, soit disant, la nettoyer avant qu’elle fasse le tour de la salle. Avec, le comble, à leur côté une sucrière dont des tâches grisâtres de sucre mouillé forment des boules qui se voyaient de loin, c’est terrible!".

Ce sont pourtant ces petits détails qui font les grandes différences dans les contrées évoluées. Supposons maintenant que notre pays n’a plus de rente pétrolière et qu’il s’est appuyé sur l’unique secteur touristique pour établir son budget annuel et nourrir tous ses enfants. En même temps, des touristes occidentaux ou autres viennent dans ce même café et constatent ce décor à la limite du pitoyable, vont-ils y revenir pour soutenir de telles extravagances, ce manque de calme et surtout d’hygiène, ces chaises mal triés, ces tables éparpillées, l’absence de courtoisie, l’odeur suffocante de la fumée, etc. ? Jamais ! Loin de la caricature ou de la littérature du caniveau, notre problème est fondamentalement dans l’éducation, la culture, le respect des autres, les manières, les comportements. Bref, c’est un problème de savoir-être, d’idées et surtout de mentalités.

Kamal Guerroua, universitaire

L'élève citoyen : on prend les Français pour des idiots

Evelyne Tschirhart est l’auteur du livre L’école dans les séries TV françaises, aux éditions Tatamis (octobre 2014).

Lors de l’émission C dans l’air du vendredi 23 janvier dont le thème portait sur : L’école – l’élève citoyen, nous avons pu assister – une fois de plus, à un grand brassage de vent. Et une fois encore, on prend les Français pour des idiots. Nous commençons à y être habitués…

Après les tueries des 7, 8 et 9 janvier dernier, après les insultes et refus de garder une minute de silence en hommage aux victimes dans les établissements scolaires, on aurait espéré un peu moins de précipitation et une réflexion un peu plus élaborée de la part du chef de l’État et du Ministre de l’Éducation Nationale. Rien de tout cela, mais des mesures gadgets qui ne vont certainement pas redresser le Mammouth depuis longtemps tombé bien bas.

Ce qui est sidérant, avec les socialistes, c’est qu’ils ne se retournent jamais ; ils ont toujours le vent en poupe quels que soient les évènements. Leur amour du changement et du progrès les propulse immanquablement vers des jours meilleurs grâce à des mesures prises avec l’énergie de la nouveauté, mesures qui s’empilent mais ne sont jamais appliquées. Et, loin de remettre en question la « refondations »[1] de l’Éducnat qui a donné les résultats que l’on sait, ils passent la vitesse suivante et annoncent la seconde. C’est ce qu’a fait le Président Hollande, lors de ses vœux aux enseignants. Refondons, refondons, c’est le fonds qui manque le moins !

Au cours de cette émission affligeante de redondance, où Dominique Rénié s’en est tiré honorablement car il a été le seul à esquisser les vrais problèmes, nous apprenions ahuris de la bouche de Caroline Roux qui animait le débat que : « Deux semaines après les attentats qui ont endeuillé le pays, il a été mis en lumière d’inquiétantes fractures au sein de la jeunesse. »

On se frotte les yeux : tout un pays était dans l’obscurité, donc dans l’ignorance de ce qui se passe depuis plus de trente ans dans l’école, dans les banlieues et nous n’avions rien vu : pas de violence dans les établissements scolaires, pas de zones de non droit dans les cités, pas d’antisémitisme. Rien de rien ! Faudrait-il se réjouir parce qu’un acte barbare d’une ampleur considérable nous a enfin ouvert les yeux ? Le gouvernement lui-même n’était au courant de rien, c’est dire… Le rapport Obin comme d’autres du même acabit ont dû se perdre dans un tiroir ou passer à la déchiqueteuse par mégarde. Ne parlons pas du fait que les assassins, bien connus de la justice avaient été remis en liberté grâce à la politique de l’excuse de Madame Taubira, sans doute pour cause de bonne conduite promise !

On comprend donc la panique de nos élites gouvernementales qui, sonnées par la monstruosité de l’attaque se sont ressaisis pour prendre « des mesures » et instrumentaliser l’école comme fer de lance de la reconquête des valeurs républicaines. Et les mesures n’ont pas tardé à sortir comme du chapeau d’un prestidigitateur. Ainsi allait-t-on mettre en œuvre :

  • La formation des professeurs à la transmission des valeurs de la Républiques. Ce seront des Ambassadeurs, nous dit-on ! Ce titre ronflant, on s’en doute, suscitera bien des vocations !
  • Un nouvel enseignement moral et civique (la nouveauté, toujours la nouveauté…) Alors que les lois qui existent déjà ne sont pas appliquées !
  • Un renforcement de l’éducation aux médias et à l’information. Les journaux ont tant à nous apprendre !
  • La célébration d’une journée de la laïcité dans tous les établissements et le même jour. (Chouette, encore une journée banalisée.)

On peut dire d’ores et déjà que ces mesures sont révolutionnaires. Le seul problème, c’est que les élèves ne sachant pas lire, ni écrire, ni élaborer un discours à peu près rationnel, on se demande comment ils pourront lire la presse et s’exprimer avec un minimum de vocabulaire. Mais l’essentiel n’est-il pas dans le vivre ensemble et l’exaltation de la tolérance et du bonheur d’être mélangés ?

Évidemment, cela aura un coût : 250 millions d’euros sur trois ans mais la République est bonne fille et sait dépenser sans compter dès lors qu’il s’agit de donner plus à ceux qui ont moins. Le retour sur investissement est hélas bien maigre. Depuis combien d’années lance-t-on des plans pour réhabiliter les banlieues ? Celles-ci s’en portent-elles mieux ? La vraie réhabilitation serait de reprendre les quartiers tombés aux mains des dealers, des frères qui se sont appropriés des territoires entiers et où les médecins, les pompiers, la police ne peuvent plus entrer. Les « zones sensibles » pour le dire par euphémisme. Depuis quarante ans, plus d’une dizaine de plans se sont succédés avec le succès que l’on sait ! Un argent colossal a été dilapidé mais qu’importe ! Il y a des entêtements qui coûtent cher aux contribuables.

« L’école n’est pas étanche aux dérives de la société » explique Najat Vallaud-Belkacem, en référence aux derniers incidents recensés. « S’il faut distinguer les jeunes qui se cherchent »- veut-elle parler de ceux qui brûlent des voitures par spleen, nausée ou mélancolie profonde ? Elle a précisé : « le non respect des rites républicains devra être systématiquement signalé. » Quelle poigne ! Quand on sait qu’un enseignant n’a pas le droit de mettre à la porte un élève qui perturbe le cours, on se dit qu’il y aura du travail…

Ainsi il y a « les jeunes qui se cherchent » et il y en a même qui se trouvent dans la conversion à l’islam, dans la violence, la délinquance et la drogue !

À partir du moment où la politique de l’excuse ne sera pas revue et corrigée, on pourra signaler ce qu’on voudra. Quand la loi n’est pas appliquée on reste dans les vœux pieux et le bavardage de comptoir.

Autre gadget annoncé : 1000 ambassadeurs seront formés à la laïcité ! Pense-t-on qu’un titre aussi ronflant que ridicule sera une assurance sur la laïcité ? Moins un gouvernement est capable d’appliquer la loi et plus il se gargarise de fausses promesses.

Par contre la Ministre s’attaquera une fois de plus à la carte scolaire pour mixer les élèves. La machine à mixer est une machine à broyer ; quelle bouillie en sortira ? Des élèves qui tireront vers le bas les moyens, les bons, ceux dont les parents le peuvent, iront gonfler les effectifs des établissements privés.

Le peu que Sarkozy avait fait en 2007 va être liquidé par la gauche arc-boutée à son égalitarisme borné et nuisible.

Lorsque Georges Fotinos (ancien Inspecteur Général) s’est exprimé sur l’école nous avons naïvement pensé qu’il en appellerait à revenir aux fondamentaux de l’école, c’est-à-dire les apprentissages. Erreur !  C’est le vivre ensemble qui est l’apothéose de la réussite selon lui ; c’est devenu le credo de tout enseignant de gauche ; le reste, c’est-à-dire la transmission des connaissances, n’est que menu fretin !

Pour lui aussi, la mixité sociale et ethnique à l’école est l’assurance de la réussite des élèves. Si c’était vrai, nous serions remontés allègrement dans le classement des rapports Pisa.

Lorsque Cynthia Fleury (philosophe) et professeur à Sciences Po, a évoqué en se gaussant le « cours magistral » pour dire que non, vraiment non, on ne pouvait plus faire cours de cette façon : « je parle, tu te tais », elle avait raison car – autres temps autres mœurs-, l’égalité exige que l’élève puisse s’exprimer parce qu’il le vaut bien. Les élèves pérorent, écoutent leur portable en classe, s’expriment sur tout et n’importe quoi mais ils ne sont pas dans une position d’infériorité et d’humiliation comme autrefois. L’essentiel c’est qu’ils déversent leur vécu ! N’ont-ils pas toute la vie pour apprendre ? Bientôt ils auront des tablettes et l’enseignement deviendra parfaitement ludique.

À ce propos, Georges Fotinos était tout à fait d’accord avec elle. Il s’est félicité de ce que le savoir du professeur ne soit plus un abus de pouvoir sur les élèves.

Ce que nous avons appris au cours de cette émission c’est que l’élève doit être avant tout « citoyen ». Le parti socialiste songe déjà aux crèches et aux pouponnières pour faire des citoyens dès le berceau.

On pourrait peut-être s’interroger : est-ce à l’école de se substituer aux manquements de l’État Républicain dont le rôle est d’appliquer les lois régaliennes ? Si lui ne le fait pas, les socialistes croient-ils que l’école le fera à sa place ? N’a-t-elle pas d’autre mission ? Et les parents ? N’est-ce pas d’abord à eux d’éduquer leurs enfants ?

Par ailleurs, la mixité sociale que l’on nous vante comme étant une chance pour tous, n’est-elle pas la cause du malaise dans la société ? Trop d’immigration nuit à l’intégration surtout quand les populations immigrées refusent pour la plupart de se plier aux lois, coutumes et modes de vie da la population de souche. Cela engendre un choc des civilisations qui ne peut contribuer sereinement à la transmission d’une culture déjà bien mise à mal par des méthodes d’enseignement aberrantes et destructrices de savoir.

————

[1] – voir mon article sur la refondation de l’école de Vincent Peillon dans E&D

Retour sur le massacre à huis clos des journalistes algériens

La tuerie de Charlie Hebdo a ravivé chez plus d’un journaliste algérien des images douloureuses, celles des 123 journalistes et employés de presse assassinés entre 1993 et fin 1997. Années noires d’un peuple qui a payé du prix du sang la terreur islamiste naissante.

 

© Le Matin  29.01.2015

Par Hassane Zerrouky

Tout a commencé début janvier 1993. Minbar al-Djoumou’â, organe du Front islamique du salut (FIS), donnait un délai de quarante jours aux journalistes pour « se repentir ». Suivait la publication d’une première liste de journalistes condamnés à mort. Au Matin : Mohamed Benchicou, Ghania Hamadou, Said Mekbel, Hassane Zerrouky, Ali Dilem. À El Watan : Omar Belhouchet, Tayeb Belghiche, Omar Berbiche, M. Messaoudi. ÀAlger républicain : Abdelhamid Benzine, Halim Mokdad, Mortada Zabouri. À Ruptures : Tahar Djaout. Et Ghania Khelifi à Liberté. La menace est relayée par Wafa, la radio clandestine du FIS. Le 14 janvier 1993, le GIA (Groupe islamique armé) étend sa sommation à l’ensemble des journalistes. Dans les rédactions, les menaces se font par téléphone, précédées par un verset coranique, et par écrit. Certes, déjà en 1990-1991, El Mounquid et El Forkane, organes propriétés du FIS, avaient promis la potence aux journalistes "judéo-sionistes" quand le FIS serait au pouvoir. Le chef de ce parti, Abassi Madani, ne les accusait-il pas d’être manipulés par « les communistes » et les "services" ? Mais, pour autant, personne alors ne pensait que les islamistes mettraient à exécution leurs menaces, tellement cela paraissait incroyable, d’autant que la liberté de la presse, arrachée à la suite du soulèvement populaire d’octobre 1988, avait à peine deux ans d’existence.

Le 18 avril 1993, rue Belhouchet à Hussein Dey (banlieue est d’Alger), trois islamistes armés sont tués dans une fusillade devant le siège du journal Le Matin. Dans la Renault 5 des tueurs, les photos ronéotypées des journalistes cités plus haut. Le 26 juin 1993, le journaliste et écrivain Tahar Djaout (trente-neuf ans), qui dénonçait la collusion entre l’islamisme et les clans conservateurs du FLN et du régime, est tué de deux balles dans la tête, inaugurant la longue liste des meurtres programmés. Une semaine avant, Omar Belhouchet (trente-neuf ans également) avait échappé miraculeusement à la mort. Neuf journalistes dont Abderrahmane Chergou (ancien maquisard communiste durant la guerre d’indépendance algérienne) seront tués entre juin et décembre 1993. Ces crimes seront légitimés par l’émir du GIA, Mourad Si Ahmed, dit Djamel Al Afghani, auteur de cette terrible phrase : "Les journalistes qui combattent l’islam par la plume périront par la lame."

Malgré le choc et une peur réelle, les journalistes algériens, qui vivent pratiquement en clandestinité, font face. Et, en dépit de la censure et des atteintes à la liberté de la presse, ils continuent d’informer… en se demandant "qui sera le prochain ?". Durant l’année 1994, 23 journalistes et deux employés de presse sont tués, dont le chroniqueur du Matin Said Mekbel. Au cours de cette même année, le 21 mars, trois islamistes armés pénètrent dans les locaux de l’Hebdo libéré, au centre d’Alger, et exécutent froidement deux journalistes et un employé. L’année suivante, en 1995, 22 autres journalistes sont assassinés dont trois du Matin, Ameur Ouagueni (trente-quatre ans), Naima Hamouda (vingt-huit ans) et Said Tazrout (trente-cinq ans). Les locaux du Matin sont l’objet de deux tentatives d’attentat à la voiture piégée le 13 septembre et, le 30 octobre, désamorcées à temps. À la suite de quoi, le journal déménage au centre d’Alger, à la Maison Tahar-Djaout, qui abrite les sièges de la plupart des journaux. Mais, le 11 février  1996, ce lieu est lui-même ciblé par un attentat au véhicule piégé. Bilan : plusieurs dizaines de morts dont trois journalistes du Soir d’Algérie.

Au total, entre juin 1993 et décembre 1997, 123 journalistes et employés de presse ont été assassinés par balles ou décapités. Une tragédie à huis clos. En France, hormis L’Humanité, Marianne et le SNJ-CGT, la solidarité des confrères n’a pas été au rendez-vous, ou si peu, ainsi que le faisait observer Omar Belhouchet dans Jeune Afrique du 23 janvier. Reporters sans frontières, alors dirigé par le triste Robert Ménard, mais aussi certains journaux – ils se reconnaîtront – mettaient insidieusement les assassinats des journalistes au compte des services algériens 
qui manipulaient les groupes islamistes ! Pire, pour se donner bonne conscience, ils parlaient de « sale guerre » et insinuaient que derrière chaque journaliste algérien 
se tenait un « flic », justifiant par anticipation les assassinats à venir (1).

Pourtant, ces meurtres avaient été revendiqués par les islamistes à travers leurs organes (Minbar al-Djoumou’â, Feth el Moubine, al-Ansar, Etbcira) mais aussi par leurs dirigeants comme Anouar Haddam, Omar Chikhi (aujourd’hui amnistié par le régime) et par le Fida (Front islamique du djihad armé), une organisation agissant sous le contrôle du GIA, spécialisée dans les assassinats de journalistes, de militants progressistes et d’intellectuels. Malgré ce lourd tribut, le pouvoir algérien n’a pas tout à fait renoncé à mettre la presse au pas. Et les islamistes, comme on l’a vu en décembre dans le cas du journaliste et écrivain Kamel Daoud, continuent de proférer des menaces de mort.

H.Z

(1) En province française de nombreux collectifs de journalistes français ont soutenu leurs confrères algériens comme à Lille et à Orléans…

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